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Jelyson, un petit crack au pays mayennais des Gédé
Publié le VENDREDI 01 JUILLET 2022


Dimanche, dans le Prix d’Essai à Vincennes, Jelyson a pris le leadership de la génération des 3 ans au trot monté tout en offrant à son entraîneur, Alexandre Pillon, un premier Groupe I. Celui qui veille au quotidien sur la destinée des « Gédé » revient sur ce moment fort d’une carrière et sur tous les obstacles qu’il a fallu franchir pour entrer à son tour dans la cour des grands.

Quand Verdict Gédé, aux paraphes de son grand-père Georges Dreux, remportait le Prix d’Amérique en 1992, Alexandre Pillon n’avait que 5 ans. Bien loin d’imaginer qu’il entrerait à son tour, trente ans plus tard, dans le cercle légendaire des vainqueurs de Groupe I. Dimanche dernier, au petit matin de son succès dans le Prix d’Essai, l’entraîneur mayennais n’était guère plus convaincu. « Il aurait été présomptueux d’imaginer que j’allais repartir de Vincennes avec un Groupe I. Jelyson était vraiment très bien. Il venait de gagner sereinement dans le Prix Serpentis, mais force est de constater que nous grimpions de plusieurs marches ». Au sommet. Face aux meilleurs trois ans sous la selle. Ambitieux pari au papier aussi pour un trotteur acquis 17 000 € mois d’un an plus tôt aux premières Ventes Osarus de Laval. Sur un coup de tête – et de génie - de son beau-père qui s’est soudainement, sans que rien ne le prédise, pris au jeu des enchères.  Alexandre n’en revient toujours pas. « On avait certes l’idée d’acheter un cheval prêt à courir avec ma belle-famille (son épouse, Margaux est la sœur de David Cottin, ndlr), mais il nous a surpris en levant le doigt sur un premier produit. Je lui ai conseillé de ne pas insister. Le poulain ne me plaisait pas. La vente était déjà bien entamée, j’ai alors regardé le livret de plus près pour tenter, devant son engouement, de trouver un élément correct. Et il est vrai que Jelyson sortait un peu du lot, au niveau de son pedigree, puisqu’il s’agit d’un fils de Timoko, donc plutôt bien né, avec pour souches des « Odyssée », comme Prodigious et « Cygnus », en oncle et en frère. Nous sommes donc allés le voir en nous fixant un prix plafond. Le cheval était affreux. Pas d’état, maigre. Par contre il venait de se qualifier au Mans dix jours plus tôt dans un chrono normal. Cela cachait forcément un petit problème de santé. Quand je l’ai sorti le premier coup, on s’est dit « houla » ! On avait du mal à le travailler et il ne réussissait pas à suivre des chevaux de sa génération que j’avais déjà qualifiés, commettant faute sur faute. C’était vraiment cata ! On l’a soigné. Il a fini par reprendre du poids et quand on lui a posé la selle sur le dos il a gagné en confiance », se souvient encore ébahi Alexandre Pillon. « A la maison, Jelyson est un cheval assez drôle qui reste compliqué dans ses allures. Il demeure très fautif. Quand on vient fort sur les autres, il a tendance à se tromper quand on le décale, par contre quand il est devant et qu’il contre les attaques, comme ce fut le cas lors de ses deux plus récentes victoires, il se sent invulnérable ». Yoann Lebourgeois en tire ainsi la quintessence jusqu’à embrasser l’apothéose. Il faut avouer que les fondations de ce chantier classique étaient bien posées. Quelques semaines plus tôt, Georgica Gédé, de l’élevage maison, avait échoué de peu dans le Prix des Centaures (Grp. I). « En effet, ça tournait autour, reprend le patron de la Houanardière. On a une bonne écurie qui commence à bien tourner. J’essaie de conserver les bons éléments, qui sont plutôt pmu ou du calibre parisien. On a eu la chance d’avoir « Georgica » qui nous a ouvert l’accès à ces courses classiques et on copie-colle un peu son programme d’entrainement sur nos plus jeunes comme Jelyson. Quand vous avez un moteur dans l’écurie, c’est tout de suite plus enrichissant de faire travailler ses élèves. Ils suivent naturellement. Si vous n’avez par contre que des mauvais, qui ne parviennent pas à dépasser des compagnons médiocres, on part aux courses sans vraiment savoir où l’on va. Quand on y voit clair, c’est bien plus facile ».

"La Houanardière, une structure à mon image"

Facile ! Un adjectif qu’Alexandre peut aujourd’hui s’approprier avec fierté. Lui qui, au-delà de cet exploit avec un produit extérieur, a réussi à redonner aux « Gédé » leurs lettres de noblesse. Avec Deux Etoiles Gédé qui fut la première à évoluer au niveau Groupe depuis ses débuts d’entraîneur en 2016, puis avec Georgica Gédé, tous deux baptisés à la hauteur de l’immense carrière de Georges et Annick, disparus trop tôt. « Dans le malheur de la disparition précoce de ma grand-mère, je me suis un peu retrouvé avec les rênes de l’entreprise. J’avais cela dit, auparavant, eu l’opportunité  d’apprendre le métier chez des gens hypers doués. J’avais fait un stage chez Yves Dreux, un autre chez Christian Bigeon, puis chez Guy Verva, des professionnels qui ont marqué l’histoire des courses parisiennes. Je manquais cela dit cruellement d’expérience. J’ai donc au début commis des erreurs, mais c’est peut-être comme ça qu’on apprend finalement, par empirisme. Aujourd’hui, j’essaie de ne pas les répéter et ça tourne plutôt pas mal pour mon entraînement. J’ai de surcroît une super équipe. On commence aussi à avoir des infrastructures qui tiennent la route. Si vous arrivez à être sûr de vous, en étant bien installé, avec de supers associés et une méthode qui vous semble être la bonne, les chevaux finissent par s’épanouir ». Les bons résultats s’enchaînent depuis deux ans. Après une année 2021 riche en nombre de gagnants, l’écurie mayennaise tutoie désormais « l’élite ». Après de longs mois d’incertitudes et de débrouille. « Depuis deux ans, nous sommes vraiment bien installés à la Houanardière qui était à la base une ferme familiale avec des bovins. Je n’ai rien repris de l’existant. J’ai préféré y construire une structure à mon image, adaptée au métier. Avec une piste comme je la souhaitais, en construisant des box. On dispose maintenant d’infrastructures saines, mais rien n’a été simple. Avec un énorme retard de livraison concernant la piste et un procès face à son concepteur qui a duré quatre ans. Durant cette période j’ai travaillé à Grosbois. On a eu cette chance inouïe d’avoir l’ancien établissement de ma grand-mère que ma mère avait souhaité conserver. Et elle avait eu raison. Sans cette parcelle, j’aurais dû arrêter mon activité. Aujourd’hui, l’élevage et l’entraînement cohabitent sur trente-cinq hectares à deux pas de Laval. Ma mère s’occupe de l’administratif. Concernant la partie élevage, composée de vingt-et-une poulinières dont une pur-sang, on s’appuie sur Carole Beaucamp qui travaille assidument avec nous depuis deux ans. Les croisements et l’entraînement, c’est mon affaire ». Jeune homme, Alexandre était parti pour faire « médecine », il est devenu producteur de rêves. Pour sa famille et son entourage immédiat. Voire à l’avenir pour ceux qui seraient tentés de le rejoindre. « Je ne refuserai pas de propriétaires extérieurs, à condition qu’ils viennent avec un projet. Après c’est une question de feeling. Mais quoi qu’il en soit, je veux conserver un nombre limité de chevaux. J’ai besoin de prendre du temps avec eux et je ne suis pas du style à déléguer le travail. Cela puise des heures et de l’énergie. Et comme j’aime bien aussi profiter un peu de la vie côté… ». Profiter, oui, mais avec le sentiment du devoir accompli. Histoire de savourer chaque délice d’une existence dont on ne maîtrise jamais le prolongement.

Fabrice Rougier
 

Elevage

Le chef-d’œuvre de Pascale Janvier

Produit de Délizia d’Odyssée, fille de Kérido du Donjon, et de Timoko, Jelyson a ravi tout son entourage jusqu’à offrir à Pascale Janvier, son éleveure en compagnie de sa fille Mélodie, la plus belle conclusion après une quarantaine d’années de productions au service de la filière.

Loin de Vincennes. Mais chacune devant leur télévision. Dans la ligne droite du Prix d’Essai, Pascale et Mélodie Janvier ont pourtant fait corps, poussé d’une seule voix leur Jelyson, ce poulain qu’ils ont fait naître et dont le père n’est autre que Timoko et le père de mère Kérido du Donjon. Plus qu’un Groupe I, ce fut la victoire de toutes les sensations selon les propos de Mélodie. « Des émotions, on a eu la chance d’en vivre beaucoup avec les courses. Mais celles qui nous ont envahies dimanche sont quand même particulières. Déjà parce que cela vient récompenser le travail de maman, mais aussi puisqu’il intervient vingt ans après la victoire de Kérido du Donjon dans le Prix du Président de la République qui se courait une heure plus tard. Une journée riche et régénérante ». Dix ans aussi après la disparition de Jean-Luc, un père stratège qui avait su marquer du fer de la famille toute une génération avec des sujets comme Kenya du Pont, Hello Dona ou encore Sud, sans oublier Kérido du Donjon, le crack aux neuf Groupes. Une vie qui s’est résumée à faire naître l’espoir. « Mes parents ont toujours fait de l’élevage depuis leur arrivée en Normandie. Ce n’est pas une science exacte. La récompense n’est pas toujours au bout. Jelyson vient quelque part couronner un tout et je suis très content pour maman. C’est son chef d’œuvre, car c’est elle qui avait acheté Delizia d’Odyssée. Pourquoi Delizia ? Car c’était une fille de Kérido du Donjon et de l’élevage d’Odyssée pour qui mes parents avaient auparavant travaillé. Il s’agissait d’une belle petite somme mine de rien. Délizia d’Odyssée fut du reste sa dernière jument. On l’a vendue en début d’année. Elle est aujourd’hui suitée d’une pouliche de Etonnant, donc on reste dans la lignée. L’élevage est devenu trop coûteux. Si ce résultat était intervenu plus tôt, nous n’aurions peut-être pas pris cette décision. Mais la boucle est bien bouclée après 40 ans de métier. Un métier particulièrement difficile, surtout quand on arrive de nulle part. Mes parents se sont faits tout seuls, c’est le fruit de leur courage. Maman peut profiter d’une retraite bien méritée ». Sans devoir de plus se soucier de l’avenir de son bébé. « Quand j’ai vu que Jelyson était chez Alexandre Pillon, je l’ai contacté et on a rapidement échangé et sympathisé via les réseaux sociaux. Je savais le poulain très compliqué avec des traits de caractère et un physique qui tirent plus vers Kérido que vers Timoko. Jeunes, les produits de Kerido sont un peu caractériels, peureux bien souvent, il faut de la patience et avoir une main de fer dans un gant de velours. Autant dire qu’il a fait un énorme boulot  Me voilà rassurée, Jelyson est tombé entre de bonnes mains. Il a trouvé la maison idéale ».

F.R.


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