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Bien qu’inquiet Keven Borgel quitte les courses soulagé
Publié le VENDREDI 07 MAI 2021


Meurtri par les soupçons de dopage qui pèsent sur la discipline du galop, Keven Borgel a officiellement stoppé son activité d’entraîneur ce jeudi. Le professionnel marseillais veut se vider la tête. Passer à autre chose. Se reconstruire, tout simplement, très loin de Borély et de Vivaux.

Depuis deux ou trois ans, l’officialisation de son retrait de la vie hippique ne tenait qu’à un fil. Mais la nouvelle qu’on redoutait tant est tombée. Jeudi, la cessation d’activité de la société d’entraînement de Keven Borgel a été prononcée. Et elle est selon l’infortuné mentor marseillais « irrémédiable à moyen terme ». L’homme aux près de mille succès qui a inscrit le nom de Rémus de la Tour au palmarès cantilien du Prix du Lys (Grp. III) et qui a propulsé au plus haut niveau régional des représentants comme Balerina, Halkin Street ou plus récemment Mademoiselle Marie et Kambura entend passer à autre chose. Fatigué, décontenancé de tout rêve, même pire de toute motivation.  Esprit Parfait, au doux nom qui laissait présager une éclaircie dans le ciel de Calas, restera à Marseille-Vivaux, dimanche, son plus récent gagnant. L’histoire aurait été belle s’il n’avait pas été le dernier. Il appartient désormais à l’histoire des courses hippiques du Sud-est. Plus de vingt années de dur labeur s’effondrent. Mais Keven Borgel veut se préserver. « Psychologiquement, cet arrêt est un soulagement. Ma décision couve depuis que les suspicions de dopage sur le centre d’entraînement de Calas et à plus grande échelle au niveau national se sont amplifiées. Voici résumée la raison de mon arrêt ». Depuis plusieurs années, le metteur au point phocéen tente de tirer la sonnette d’alarme à ce sujet.

"Dans un silence absolu, c’est toute une profession qui en souffre"

Sans vraiment être entendu, si ce n’est par ceux qui se sentent dans l’œil du cyclone. « J’ai à maintes reprises alerté les institutions sur des performances de pur-sang que je juge anormales. Comment comprendre que certains chevaux puissent progresser de manière significative chez un entraîneur avant de totalement sombrer dès lors qu’ils quittent leur établissement ? En quittant certains boxs, c’est frappant, beaucoup de compétiteurs disparaissent de la circulation. Alors, dans un silence absolu, c’est toute une profession qui en souffre. Tous les maillons d’une écurie. Les propriétaires quittent le navire pour aller chercher des résultats ailleurs, les effectifs s’amoindrissent, le manque de confiance gagne le personnel, tout est soudainement remis en question. On en finit par douter de soi-même, de ses compétences professionnelles alors que durant nombre d’années j’ai, je pense, toujours répondu aux attentes de mes clients, été à la hauteur. Vous savez, je n’ai jamais eu l’ambition, ni les capacités du reste, de devenir un grand entraîneur classique parisien, mais au niveau régional j’ai quand même emmené nombre de mes pensionnaires au plus haut niveau » s’étonne encore le socio-professionnel de Calas. L’affaire « Andrea Marcialis », qui défrayait il y a quelques semaines la chronique n’est pas parvenue à apaiser ses maux. Une brèche s’est pourtant ouverte. « Le cas Marcialis, c’est l’arbre qui cache la forêt. Depuis trois ans, il ne s’est pas passé un jour où, sur un hippodrome, on ne m’a pas parlé de dopage. J’ai reçu de multiples coups de fils, et ce quasi quotidiennement, de gens qui s’interrogent sur telle ou telle victoire. Il faut assainir notre profession. A mes yeux, le problème provient des statuts et des organigrammes.  Il existe trop de proximité entre le laboratoire qui s’occupe du dopage et France Galop. Si le laboratoire prélève mais que l’enquête est diligentée par France Galop, ça crée une grande porosité. Dans le sport « humain », l’autorité française de lutte anti-dopage est totalement indépendante des fédérations sportives. Au galop, on cultive l’entre-soi. De fait, on peut se demander où se limite l’action du laboratoire et si l’on trouve vraiment ce que l’on veut bien chercher. A la transparence, on préfère l’omerta. C’est le principe du vase clos, chacun se tient par la main », déplore encore Keven Borgel, peiné par cette profession qu’il avait embrassée très jeune comme assistant entraîneur chez Nicolas Clément à Chantilly puis chez Christophe Clément aux Etats-Unis.

"J’ai la sensation d’être allé au bout de mes possibilités"

« Tout cela fait très peur et je souhaite bonne chance à tous les entraîneurs intègres parce que la concurrence irrationnelle est selon moi devenue trop féroce. Pour ma part, je ne pouvais plus tenir, que ce soit moralement ou économiquement. C’est avant tout un choix pour ma préservation mentale. Je ne vais pas réinvestir de fonds personnels dans ce système s’il n’est pas revu et corrigé. Entraîneur de chevaux est un métier très prenant. Vous ne dormez presque plus. Ça vous ronge complètement. Alors quand en plus ça se passe mal, tout s’accentue. Maintenant, je ne pars pas sur un sentiment d’échec ni avec de l’aigreur. J’ai rempli ma mission durant plus de 20 ans. J’ai la sensation d’être allé au bout de mes possibilités. Mais la partie est finie. Je ne peux plus lutter. Je veux simplement remercier Mickaël Soigneux et Jacques Campo d’avoir tant apporté à l’écurie jusqu’à son dernier jour ». La page est tournée. Sauf rebondissement, Keven Borgel n’apparaîtra plus sur les hippodromes « au moins pendant deux ans », lâche-t-il. L’heure est à la reconstruction. « Je veux essayer de me sevrer, de me couper du monde des courses. Je pense partir dans les semaines ou dans les mois à venir sur une île déserte de l’Océan Indien pour me vider la tête et évacuer tout le mal que j’ai pu supporter ces dernières années. Je vais me replonger dans l’étude des civilisations humaines et de l’histoire de France. Il y a tant de grands livres de la littérature française que je n’ai jusqu’à présent pas eu le temps de lire. J’ai besoin de penser à autre chose. Je vais aussi dans les prochaines heures démissionner de tous mes mandats au sein de l’institution. Puis la vie reprendra. La nature a horreur du vide. Par conséquent, il y aura toujours des gens pour me remplacer, il y aura toujours des partants, toujours des gagnants,... Mais je compte fermement sur les institutions et sur les maisons-mères pour éteindre l’incendie qui ravage toute une profession. Il n’y a pas loin du Capitole à la Roche Tarpéienne. A certains de méditer ! ».

F.R.



Des hauteurs de Marseille à l’enfer
Hors champ des caméras, Keven Borgel découvre dans sa jeunesse les finesses du métier en étant assistant entraîneur de Nicolas Clément à Chantilly avant de mettre cap sur les Etats-Unis où il rejoint, en Floride, les écuries de Christophe Clément. Ce n’est qu’à la fin des années 90, après des heures d’observations, le cheval dans la peau, qu’il ouvre son antenne à Calas. Très vite, Pour le Plaisir ouvre le compteur de sa société d’entraînement du côté de Cavaillon. La première d’une longue chaîne de 923 succès de laquelle on extraira, bien entendu, son plus beau maillon Remus de la Tour, vainqueur du Prix du Lys (Grp. III) à Chantilly en 2012. Un bonus « parisien » pour un phocéen intraitable dans le Quart Sud-est. Les hippodromes de Lyon et de Marseille sont ses terrains de jeu. Deux Prix Delahante, et le Grand Prix Gaston-Defferre dans sa fédération, une Coupe des 3 ans et un Critérium de Lyon au pays des Gones. Avec 62 gagnants en 2006, notamment emmenée par Danseuse de Rock et Tabarana (4 victoires), l’écurie phocéenne intègre le Top 10 au niveau national. En 2016, les « black type » Mademoiselle Marie et Kambura tirent encore l’entreprise vers le haut. Plus dure sera la descente aux enfers à partir de 2019. Du 23 au 30 avril dernier, Keven Borgel signe trois victoires dans son fief à Marseille. Mais il est trop tard ! Le mal est fait. Un baroud d’honneur avant de tirer sa révérence. Triste issue. 

 


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