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Olivier Auchère, la nouvelle vie du Président de Moulins
Publié le VENDREDI 23 AVRIL 2021


Bep's et Olivier Auchère, les "provinciaux" que personne n'attendait.

Désormais propriétaire d’un bar lounge à Moulins, Olivier Auchère a subitement disparu des écuries du Centre-est un jour de décembre 2019 en laissant au vestiaire les cicatrices d’une vie consacrée à l’obstacle. Vainqueur du Prix du Président de la République en 1995 avec Bep’s, il revient passionnément sur sa carrière sans vraie note de nostalgie. 

La chute aura été vertigineuse. Celle de son écurie d’abord, dont il aura porté durant dix ans le poids du sacrifice. Mais surtout celle de l’un de ses deux fils, Antoine, accidenté très grièvement dans le Grand Cross de Dieppe durant l’été 2019. Deux événements qui vous marquent à jamais. Si ces feuilletons se sont bien terminés, Olivier Auchère a préféré jeter l’éponge, définitivement, il y a un an et demi. « J’ai raccroché les bottes le 5 décembre 2019 exactement. Ça me trottait dans la tête depuis un moment, puis l’accident qui a failli coûter la vie à mon fils a précipité ma décision. Ce métier m’a beaucoup donné, mais il m’a aussi beaucoup pris. Il fallait arrêter. J’avais auparavant stoppé mon activité d’entraîneur avec un déficit important. J’ai peut-être été trop gentil avec mes propriétaires, avec les jockeys aussi. Il était vraiment temps de réagir. Donc, j’ai bossé durant plus de trois ans d’abord chez Emmanuel Clayeux, puis chez Augustin de Boisbrunet afin de rembourser mes dettes. Ma vie de famille en a subi les conséquences. Mon divorce était inéluctable. Mes enfants ne m’en ont jamais voulu car ils avaient toujours baigné dans le jus des courses, mais personnellement je ne les ai pour ainsi dire pas vu grandir alors qu’aujourd’hui chaque instant passé en famille me ravit. J’ai pu reconstruire une vraie vie sociale », apprécie ce Moulinois de 58 ans désormais apaisé, heureux,… « on pourrait dire que du bonheur », glisse t’il dans la conversation.

"Le métier ne me manque pas du tout"

Puis d’ajouter : « attention, je ne renie pas mes 39 ans passés dans les écuries à me lever tous les matins à 5 heures pour aller travailler les chevaux. Il m’arrive même encore parfois de monter chez Augustin. Mais il faut qu’il fasse beau. Et jamais au premier lot. Davantage par simple plaisir de voir les collègues. Sinon le métier ne me manque pas du tout. Je continue toutefois de me tenir au courant, de suivre de près les grosses épreuves. On ne peut pas tout abandonner du jour au lendemain. Je connais tellement de monde dans ce milieu. Le peu de fois où l’on se croise, on est contents de se retrouver. Que ce soit des plus hautes sphères aux plus modestes écuries j’ai toujours été apprécié. Quand nous avons dû faire face à l’accident d’Antoine, j’ai été surpris par ma pseudo notoriété. Des coups de téléphone sans arrêt, une cagnotte de soutien qui ne cessait de grimper,… même si ça reste un métier de fous, les acteurs des courses appartiennent à une grande famille ». Dimanche, Olivier sera devant le petit écran. Fidèle pour célébrer une sorte d’anniversaire. En effet, il y a 26 ans il s’imposait dans le Prix du Président de la République à Auteuil avec Bep’s. Des lauréats qui avaient plusieurs jours durant défrayé la chronique. « Aujourd’hui, je mesure tout l’impact qu’avait eu ce succès. De nos jours, les petites structures de province gagnent à tout-va, que ce soit à Paris ou à l’étranger, c’est devenu monnaie courante. Mais en 1995 nous étions des précurseurs. Monsieur Parodat, le propriétaire de Bep’s, n’était qu’un petit permis d’entraîner. Quant à moi, j’étais surtout connu dans le off du microcosme parisien car j’avais monté un an et demi pour Loïc Audon et travaillé 6 ans chez Jean Lesbordes où je sautais les cracks en compagnie de Didier Mescam. C’était une époque fabuleuse. Ces expériences m’ont permis de grandir car je pense que j’étais un bon lad. J’étais du reste surtout reconnu comme tel. Alors ce Prix du Président de la République arrivait comme une récompense au travail. Cela faisait plus de dix ans que j'oeuvrais dans l’anonymat comme beaucoup de très bons cavaliers du matin. Ce jour-là les gens découvraient Olivier Auchère, mettaient un visage sur un nom. J’ai fait la une des journaux spécialisés trois jours durant, alors qu’aujourd’hui on en écrit trois lignes et l’on passe à autre chose. Cette course avait auparavant un vrai cachet. Elle perd au fil des ans de sa superbe. Par manque de communication, France Galop est en train d’en faire un vulgaire handicap. Les temps ont changé. Du reste, quand on déroule la rétrospective des gagnants du « Président » j’arrive désormais en bas du tableau. Pareil pour les grands classiques de plat où l’on ne voit même plus apparaître le nom d’Yves Saint-Martin. Ça me ferait pleurer. En tout cas, je ne joue qu’une fois par an, mais j’irai dimanche faire mon petit tiercé ».

"Ce milieu est devenu fou"

Et remonteront alors tous ces bons vieux souvenirs à la surface, famille et amis n’oubliant jamais la piqûre de rappel. « Chaque année les enfants remettent ça sur le tapis. Paul va sûrement publier la vidéo sur les réseaux sociaux, les bons vieux copains comme Thierry Labatut me font toujours un clin d’oeil sympa,… J’ai même encore la cassette de la course. On la passe parfois deux ou trois fois d’affilée en une semaine puis elle retrouve le placard pour deux ans. Je suis si heureux d’avoir vécu ces belles années. Aujourd’hui, je ne sais pas si je serais aussi enthousiaste. Etre jockey est devenu difficile. Les gars n’ont plus cinq minutes à eux et sont constamment sur la route. Les entraîneurs, eux, sont harcelés par les propriétaires en attente de résultats, sans cesse sollicités par les agents, ce milieu est devenu fou ». Désormais propriétaire du bar lounge « Les sept planches » à Moulins, Olivier attend les ordres du starter pour la réouverture de son établissement. Un concept en total décalage avec le monde des courses même si la photo d’arrivée du Prix du Président de la République 1995 attire l’attention des curieux entre deux planches de tapas bien garnies. Pour les épicuriens Olivier restera toujours le favori.

Fabrice Rougier


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