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Masschaele le roi Philippe
Publié le JEUDI 28 JUILLET 2022


En plein cœur des vacances, Philippe Masschaele a choisi le décor biarrot et un pensionnaire de Matthieu Varin pour signer son 2000ème succès. A 53 ans, le jockey belge qui a connu la gloire au début du siècle reste pour bien des raisons un avant-gardiste, l’instigateur des nouvelles générations.

Hippodrome de Biarritz. Jeudi 21 juillet. Philippe Masschaele oblitère avec Joy Bankir, pour l’entraînement de Matthieu Varin, son deux millième gagnant. 1237 en France. 763 en Belgique. Une victoire en solitaire, l’une des plus faciles de sa carrière, pour ce Belge à qui le trot français devra éternellement faire montre de reconnaissance pour l’ensemble de son oeuvre.  Pourtant, à l’exploit, Philippe préfère répondre au présent plutôt qu’au passé. « Cette victoire se faisait attendre. Cela faisait un bon bout de temps que je n’avais pas trop la forme. C’est un petit symbole qu’elle intervienne à Biarritz, la destination de mes vacances, même si j’ai peut-être été un peu moins bien armé cette année. Il y a des périodes favorables, d’autres non. Les courses ont toujours été ainsi. On travaille beaucoup tout le reste de l’année, du coup j’ai pris pour habitude de me réserver mon mois de juillet pour retrouver tous les amis sur le meeting. Le soleil, la plage et les vagues… ».  Le calme dans le travail. Tout du moins jusqu’à ce week-end avant son retour au pays. Sa patrie. Celle qu’il n’abandonnerait pour rien au Monde même si les Français chanteraient pour lui La Marseillaise en chœur. « Je travaille en France, mais je vis en Belgique à une heure de la frontière. La famille est très importante chez nous, on reste bien accroché à nos racines. Cela dit, j’ai baroudé un peu. Mes parents ne figuraient pas au chapitre des grands noms du trot. On est humblement une petite famille du métier et il a donc fallu se construire, se faire une place et aller chercher le pognon là où il était. J’ai fait des kilomètres, mais je ne regrette rien. J’ai mené ma barque comme je l’entendais. Je suis très reconnaissant de ce qu’a fait maman. Elle a perdu mon père, son mari, toute jeune en 1976. Elle a néanmoins poursuivi son activité. C’était une pionnière, l’une des premières femmes du circuit. Et elle a tout de même fait son petit bonhomme de chemin », reprend l’homme de 53 ans qui, à l’aube de notre millénaire, avait révolutionné la discipline du trot monté.

"On va aujourd’hui presque trop vite"

A tel point que son retrait des pelotons a généré un vide. « Je ne peux pas dire que monter en compétition me manque. Ce qui me chagrine davantage c’est que nous manquons aujourd’hui cruellement de jockeys en province. Mais il y a un temps pour tout. J’ai vieilli, j’ai grossi. Et c’est de nos jours plus physique. Faut être affûté, un vrai jockey de galop. Regardez Mathieu Mottier, il est vraiment beau à voir à cheval. Avec sa grandeur, on touche la perfection. Quand il monte Gladys des Plaines, il fait corps avec la jument. C’est magnifique. Comme lui, Alex Abrivard, Yoann Lebourgeois et Eric Raffin sont de grands pilotes, de vrais athlètes », constate encore le concepteur de la monte en avant, l’homme aussi qui savait mieux que quiconque gagner une course dès la volte. « Cette monte a changé la donne. J’en conserve une certaine fierté. Sur le coup, j’en ai profité. Non seulement on y a gagné en vitesse, mais c’est aussi plus esthétique, plus académique. C’est plus fluide même si, à la limite, on va aujourd’hui presque trop vite (rires). Quand les chevaux sont légers dans la bouche, il suffit juste de le mettre un peu sur le gaz pour qu’ils restent en suspension. J’avais fait de cette technique une spécialité. J’étais le roi du 2100 mètres on va dire ». Le patron du monté.

"Le tout répressif l'emporte"

Avec quatre étriers d’or et huit Groupe I comme récompenses suprêmes. « Miss Castelle, Leda d’Occagnes et Kérido du Donjon resteront comme mes trois bons chevaux. Mais une carrière ne se limite pas aux titres de noblesse. Certes j’en ai gagné des bonnes, mais j’ai surtout remporté beaucoup de prix de série notamment durant la période où je travaillais pour Fernand Dubois. J’étais tout jeune. A cette époque-là, il courrait ses trotteurs déferrés des quatre, avec le bonnet fermé et sans enrênement.  Moi je montais en avant. On a passé des cotes à 15 ou 20/1. Il m’en a offert des penalties. C’était d’une facilité déconcertante avec lui ». Pour autant ne faites pas dire à Philippe Masschaele que les courses étaient mieux avant. « Je ne veux pas qu’on me traite de vieux con. Avant c’était bien, mais maintenant ce n’est pas mal non plus. On peut regretter la baisse d’affluence sur les hippodromes. On a connu Enghien avec des tribunes bourrées. Il fallait faire bouger les spectateurs pour rentrer le cheval. Malgré la communication de Le Trot, on n’arrive pas à faire revenir ce public. Aujourd’hui, c’est le tout répressif qui l’emporte. Les décisions des commissaires, les faux départs. Avant il y avait moins de reprises à la volte. Moins de mises à pied aussi. Désormais t’es sanctionné si tu rentres une seconde trop tôt. Et pourtant je trouve qu’il y avait auparavant plus de respect entre les jockeys. Mais bon, on était plus jeunes, on s’amusait plus, on a fait comme tout le monde quelques conneries, c’était quand même le bon temps ». A l’évocation du nom de Philippe Masschaele renaît chez les turfistes une once de nostalgie. Et cela demeure un plaisir immense de croiser au sulky le petit belge, ce grand bonhomme aux désormais 2001 succès, au détour de nos bleds.

Fabrice Rougier


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