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Nathalie Desoutter : Dimanche fut le plus dur obstacle à franchir
Publié le VENDREDI 24 FEVRIER 2023


Après vingt-quatre saisons intenses, entre plat et obstacle, Nathalie Desoutter a décroché dimanche à l’occasion de l’ultime réunion du Meeting de Pau sa 699ème victoire sur Athena du Luy. Mais surtout la dernière d’une carrière remarquable. Nous l’avons rencontrée en milieu de semaine encore sous le choc de toutes les marques de sympathie qui lui ont été témoignées, mais surtout ravie d’avoir mis un terme à son activité à ce qu’elle juge être le bon moment.

Tant d’admiration devant ce petit bout de femme. « Dame de fer », « Machine de guerre » « Exemple de courage et de ténacité », … depuis une semaine la presse est dithyrambique. Elle n’a de colonnes que pour Nathalie Desoutter. Rares sont les hommages aussi vibrants, aussi rassembleurs, reçus de son vivant. La communauté hippique se masse et se veut unanime. Inhabituel constat. Dimanche fut le jour du déchirement. Alors que l’hiver quitte Pau, la jockey abandonne le métier, jette l’éponge en sortant du ring. Non sans adresser à ses supporters, sous forme de clin d’oeil, un dernier succès sur Athena du Luy. Le 699ème d’une carrière entamée en 1999 chez Didier Guillemin. Cette même année, la Petite Fée Anne-Sophie Madeleine quittait les pelotons après avoir été avec Béatrice Marie l’une des pionnières dans la discipline de l’obstacle. Un passage de témoin. Un symbole fort pour des générations de cavalières qui n’osaient pas croire en cette époque à la misogynie d’un métier. « Quand j’ai commencé mon apprentissage, j’aurai signé pour une telle carrière. J’en retiens qu’en persévérant, on finit toujours par aller plus loin. Désormais, il y a la décharge pour les femmes jockeys. Les filles sont également mieux acceptées. Mais ça ne suffit pas. Si le métier est moins verrouillé, la difficulté en soi est restée identique. Il faut constamment se battre, se montrer en piste ». Notre landaise aura ainsi composé jusqu’au dernier coup de cravache. Aimée, adulée, cible d’un respect et d’un amour souvent inavoués. La vague de sentiments qui soudainement déferlait sur le Pont-Long, Nathalie l’a prise en pleine poire comme on percute le rail-ditch à pleine vitesse. « Ça prend les tripes. C’était génial, une journée extraordinaire. Mais pour rien au Monde je ne voudrai revivre une telle journée. C’est trop fort en émotion ». Une larme apparaît dans sa voix. Celle que l’on pensait invulnérable échappe une timide sensibilité. Mercredi, soit 72 heures après l’arrêt des combats, elle restait groggy.

Des coups de plus en plus douloureux

Nathalie commençait à peine à réaliser, à se projeter du passé vers l’avenir. Sans savoir comment passer ce mur en pierres. « C’est la première fois que je prends des vacances sans savoir de quoi demain sera fait. Pour l’instant je savoure. C’est dur, c’est lourd comme décision, mais ça ne pouvait pas mieux se terminer. Toutefois, dimanche fut certainement le plus dur obstacle que j’ai eu à franchir de toute ma carrière. Maintenant il va falloir rebondir. La vie n’est jamais facile. Mais quoi qu’il arrive, je demeure ravie de ce que j’ai pu accomplir jusque-là ». Qui ne le serait pas ? Une quinzaine de Groupes, treize Quintés dont celui encore fumant du 13 novembre dernier à Auteuil. Des exploits, un quart de siècle durant, que seules les fractures parvenaient à freiner. Maintes fois tombée, Nathalie s’est toujours reconstruite. Une vie mouvementée qui se résume entre l’entrée des artistes et la sortie de secours. Aussi robuste dans le « off » que dans le « in ». Mais aux bourgeons de sa quarantaine les saisons devenaient trop rigoureuses. « A mes 40 ans, je voulais déjà m’arrêter, mais je ne me sentais pas prête. J’ai juste prolongé. Il fallait choisir le bon moment. Toute l’année je fais beaucoup de kilomètres tout en préparant nombre de chevaux pour l’hiver à Pau. Je ne joue pas ma saison sur un meeting, mais Pau a toujours été l’endroit où mes clients m’ont fait confiance, où l’on a souvent été les meilleurs, entre guillemets, donc il aurait été dommage d’avoir effectué tout ce travail sans en profiter. Je me suis dit allez hop un dernier meeting. Cet automne j’ai connu de lourdes chutes, j’ai pris des coups. Plus les mois passent et plus ils font mal. Comme je dis, je pense que j’ai assez poussé. Si certains ont été surpris par ma décision cela signifie quelque part qu’ils ne me connaissent pas tant que ça. Pour mes proches cela devenait une évidence. Je voulais arrêter en évoluant encore à un bon niveau. D’autre part, je ne pensais pas posséder suffisamment de bonnes cartouches pour la réouverture parisienne. Athena du Luy a donc choisi le bon moment pour me faire sortir par la grande porte ». Nathalie Desoutter appartient désormais à la légende et rejoint au disque dur de nos plus beaux souvenirs Christophe Pieux. Deux grands passionnés qui auront tant apporté aux courses jusqu’à l’épilogue. Qu’importe le danger ! « Je n’ai jamais voulu compter les fractures, reprend la toute jeune retraitée. Dans ces moments, la famille est importante. J’ai également de nombreux amis qui m’ont toujours aidée à me relever. Et puis il y a surtout les chevaux. On évoque souvent nos pépins physiques, mais le plus grand malheur de ma vie est d’avoir perdu mon père. Suite à cela, seuls les chevaux m’ont permis de rebondir. Ce sont eux à qui il faut rendre hommage. Ils m’ont fait vibrer et m’ont permis de me battre jusqu’au dernier poteau d’arrivée ». Voilà plusieurs matins, et ce n’était plus arrivé depuis bien longtemps, que le réveil de Nathalie ne sonne plus. Pas question pour autant de succomber au charme d’une grasse matinée. Entre habitude et audace, pour elle, la vie se savoure dès l’aurore. Son ultime bonheur palois restera pour nous un magnifique coucher de soleil.
F. R.


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